Quelques volets du commerce Roumain en 2022

Pouvoir d’achat – Déficit commercial – Ukraine – Ventes de l’industrie de la défense – Semi-conducteurs – Drôles d’initiatives d’affaires – Chaînes commerciales et autres formes de commerce adaptées aux nouvelles habitudes de consommation et d’achat, voici les thèmes abordés dans cet article.

Pouvoir d’achat – Déficit commercial

Pour la Roumanie, l’année 2022 – différente des précédentes comme partout en Europe – présente quelques traits spécifiques qu’on peut repérer même dans une brève analyse de l’état du commerce.

En 2022, le pouvoir d’achat moyen des Roumains – de 8,017 euros par habitant – est inférieur à la moyenne européenne de 51% ; par ailleurs, selon une étude sur 42 pays, la Roumanie occupe la 31e place.

A la fin de 2022, la Roumanie a eu un déficit commercial de 34 milliards d’euros, en hausse de 44% – déterminé par la croissance de 28,1% des importations et de seulement 23,1% des exportations. En termes chiffrés, la Roumanie a exporté des biens de 91,9 milliards d’euros et a importé des marchandises pour 126 milliards d’euros. Le montant des échanges de biens intra-UE27 a été de 66,45 milliards d’euros à l’exportation et de 89,33 milliards d’euros à l’importation, de 19,3% supérieures par rapport à novembre 2021.

Le montant des échanges de biens extra-UE27 a été de 25,49 milliards d’euros aux exportations et de 36,7 milliards d’euros aux importations, représentant 27,4% du total des exportations et de 29,1% du total des importations. En moyenne 50% des denrées vendues en Roumanie proviennent des importations. Le plus grand déficit porte sur la viande de porc, volailles, poisson, légumes et fruits. Même dans les domaines où la Roumanie possède des matières premières en abondance – panification et industrie de l’huile – les importations dépassent de 10%. On exporte bon marché – du blé et du tournesol et on importe des produits finis à partir de ces matières premières. La même tendance sur le marché de légumes et de fruits : les importations dépassent d’un milliard d’euros les exportations.

Le déficit commercial de 2022 a dépassé en Roumanie, même celui enregistré dans la crise économique de 2008.

Ukraine – commerce bilatéral

Un accord d’association entre UE et l’Ukraine entré en vigueur en septembre 2017 représente une étape importante dans les relations bilatérales, offrant de nouvelles opportunités aux deux „partenaires”. Avant la guerre d’Ukraine le volume total des importations agro-alimentaires en Union Européenne était d’environ 200 000 tonnes par an. En 2021, les importations de blé d’Ukraine vers l’Union Européenne s’élevaient à 287 000 tonnes. Grâce à ces accords, le commerce bilatéral entre la Roumanie et l’Ukraine s’est intensifié. L’Institut National de Statistique de Roumanie, montre qu’en 2019, le volume du commerce bilatéral s’est élevé à 1547,4 millions d’euros, enregistrant une hausse de 13,7 % face à l’année précédente.

Mais, la guerre d’Ukraine à nos frontières, a complètement changé les flux de marchandises dans le commerce bilatéral. Les exportations de céréales d’Ukraine – à cause des prix très bas – affectent d’une manière négative les marchés internes de plusieurs pays de proximité, parmi lesquels, la Roumanie : les producteurs roumains de céréales, dont les subventions sont assez modestes, ont des difficultés à valoriser la récolte locale.

Dans la première moitié de 2022, la Roumanie a acheté de très grandes quantités de graines de tournesol – 151,8 milliers de tonnes pour un montant de 102 millions d’euros – face à 166,6 tonnes pour 254.100 euros en 2021 (une hausse de 911 %). Les importations d’huile de tournesol (une hausse de 163 % en 2022 – 15,5 milliers de tonnes pour un montant de 26,6 millions d’euros, ont pris parfois la route de l’exportation en Bulgarie, en Pologne ou en Hongrie. De même, sur le marché interne le prix de cette huile était inférieur à celui ayant d’autres provenances.

Une autre surprise dans la balance commerciale de Roumanie avec l’Ukraine est le maïs avec une croissance de volume de 962 % par rapport à l’année précédente – 177,9 milliers de tonnes pour un montant de 48,4 millions d’euros ; la quantité exportée en 2022 a été de 760 tonnes.

Quelques industries plus petites ont souffert à cause des importations en baisse d’Ukraine : fils, câbles conducteurs qui ont diminué de 34,5% face à la même période de 2021 ; les minerais de fer diminués de 49,8%; les huiles brutes presque absentes ; des produits laminés plats 5.900 tonnes versus 45.840 tonnes en 2021.

Ventes de l’industrie de la défense

En septembre 2020, les Ministres de la Défense de Roumanie et d’Ukraine ont signé et parafé l’accord de coopération technico – militaire adapté au nouveau contexte géo-politique concernant : les aquisitions d’armement, de licences de production d’armement, d’entretien et de standardisation.

En 2022, le Gouvernement a alloué 40 millions d’euros pour les investissements dans l’industrie nationale de la défense. Dans ce domaine, la Compagnie Nationale Romarm S.A. est le principal fournisseur d’équipement militaire, munition et service d’entretien.Ses ventes ont augmenté six fois en 2022, par rapport à l’année précédente. En outre, la perspective commerciale à moyen et long terme reste optimiste grâce aux sommes importantes affectées pour moderniser les lignes de munitions, de même que pour revigorer les unités qui assurent les services. L’intention d’élargir la gamme de produits de cette industrie se fonde sur des partenariats avec des compagnies étrangères ; en ce sens, Electromecanica Ploiești a préparé dans un partenariat étranger, la fabrication des fusées de type SkyCeptor. De même,Uzina Mecanică de Cugir a commencé un programme d’investissement,Uzina Mecanică Plopeniest entrée dans un processus de modernisation pour les lignes de production spécifiques. Tout s’inscrit dans les recommandations de l’Agence Européenne de la Défense.

Semi-conducteurs

Après une brève baisse des ventes, au début de 2020 à cause de la pandémie, l’industrie des semi-conducteurs a connu en 2022 une période d’extraordinaire croissance. Mais, le ralentissement de l’économie (une demande diminuée) dans la deuxième moitié de la même année, a déterminé une nouvelle baisse. Toutefois, à long terme, on peut rester optimiste, car la Roumanie est un pays avec une indépendance énergétique supérieure aux autres pays d’Europe, un pays qui possède les matières premières indispensables au processus de production des semi-conducteurs, de même qu’un capital humain apte à réinventer cette industrie ayant une tradition de plusieurs dizaines d’années en microélectronique. Le financement par le programme PNRR, ciblé, soutiendra le développement des compagnies éligibles, pour l’innovation institutionnelle, pour la recherche académique et appliquée. Toutes les bonnes intentions et les efforts de financement des compagnies actives sont focalisés sur une production de processeurs à consommation réduite d’énergie et des chips. En février 2022, le Ministère de l’Economie a transmis à la Commission Européenne la liste des compagnies actives pour un financement d’environ 43 milliards d’euros ; en début d’année l’appel d’offres était destiné aux entreprises. Voilà des provocations à court terme mais une attitude optimiste à long terme, la Roumanie pouvant produire environ 15% du nécessaire européen de semi-conducteurs.

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Drôles d’initiatives d’affaires

« Faire germer toutes les graines ! » Un penchant, un passe-temps (hobby) soutenu par un talent, un modèle vu à l’étranger, sont le plus souvent des « graines » qui vont germer dans les affaires. Les avantages du commerce en ligne favorisent les initiatives à petite échelle pour se développer ici et parfois se faire connaître à l’étranger. Il faut de la persévérance et du courage à surmonter les nombreux obstacles. La Banca Transilvania qui soutient financièrement les petits entrepreneurs, se sert du Journal financier pour présenter au public ces nouvelles idées d’affaires pour le développement desquelles, au besoin, les initiateurs suivent des cours spécialisés dans le pays ou à l’étranger. Dans ce qui suit, quelques exemples :

  • Le concept Affaires pour le voyage, démarré avec un financement de « start-Up Nation Diaspora », a généré en 2022 un chiffre d’affaires de 9 000 euros, deux fois supérieur à celui de 2021. L’objectif principal pour l’avenir est de pénétrer sur le marché international, après avoir participé à une campagne de financement participatif (crowdfunding).
  • La société Pannerpain, pâtisserie et confiserie – née dans une zone touristique exquise (près du château de Bran), a fait en 2022 un chiffre d’affaires de 850 000 euros en croissance de 25% par rapport à l’année antérieure. L’argent a été réinvesti pour l’équipement, l’aménagement et dans des cours de formation.
  • L’affaire le Bracelet du Succès a atteint en 2022 (5 ans après son démarrage), 46 000 euros chiffre d’affaires, ce qui donne envie à la fondatrice de vouloir ouvrir son propre magasin physique.
  • Pour ouvrir une glacerie artisanale et une affaire avec du chocolat à la lavande, au poivre ou à l’anis, après un cours spécialisé dans le pays et, le patron a rapporté en 2022, un chiffre d’affaires peu sous 50 000 euros.
  • La production et vente des jouets qui parlent, s’inscrit dans un projet éducationnel de la ville d’Oradea, le chiffre d’affaires estimé pour 2022, étant de 550 000 euros.
  • Les estimations pour une affaire avec des cônes de barbe à papa, démarrée avec 2 000 euros, se chiffraient pour 2022 à 16.000 euros.
  • Un atelier de bas-reliefs pour les murs magiques (prix 2 000 euros pour 4 à 5 m2), ont conquis de clients de Roumanie et de Belgique.
  • Une affaire avec des bijoux en céramique et des vêtements,a fait en 2022 un profit de 11.800 euros.
  • Une affaire de famille avec une équipe de cinq personnes a mis sur pieds un atelier de meubles personnalisé enregistrant en 2022 une hausse de 50% par rapport à 2021 (chiffre d’affaires 75 000 euros).
  • Une jeune maman – licenciée en constructions et designer d’intérieur – dont lebébé est tombé du lit, a investi 2 000 euros dans un nouveau concept : lit au niveau du sol, ce qui lui a rapporté un profit de dizaines de milliers d’euros provenant des clients : maternelles, salines, espace de jeu pour les enfants – dans un contexte économique relativement stable. Mais, en 2022, pour atteindre un chiffre d’affaires 3 fois supérieur à celui de 2021, la société a changé de stratégie, mettant en vedette la vente de produits de petite taille et meilleur marché.

Et la liste ne s’y arrête pas : d’autres petites affaires se développent et fleurissent grâce aux ressources personnelles, aux fonds de la famille, aux fonds européens non-remboursables ou aux fonds reçus sur des programmes financiers internes.

Chaînes commerciales et autres formes de commerce et de livraison, adaptées aux nouvelles habitudes de consommation et d’achat

Il y a quelques années, à Bucarest, je faisais mes emplettes – au choix – dans les premiers supermarchés implantés dans la capitale : Carrefour, Metro, Cora et Selgros – tous les quatre à une distance de plusieurs km de mon domicile; je me déplaçais là une fois par mois ou toutes les 2 semaines. Je valorisais ainsi, l’avantage offert des grandes surfaces de trouver dans une seule location, ce dont j’avais besoin – nourriture et autres. Pour ces achats en grandes quantités, la voiture était indispensable.

Comme notre capitale et d’autres grandes villes de Roumanie disposent encore de terrains vides après la démolition d’anciens bâtiments ou enceintes industrielles désaffectées, du jour au lendemain, poussent comme les champignons, des supermarchés et des supérettes : Kaufland, Lidl, Profi, Carrefour, Mega Image, Penny Market. Ici, on peut se déplacer en tram, en bus ou à bicyclette – ce qui nous fait changer nos habitudes d’achat sous l’aspect de la quantité de marchandise et de la fréquence des courses : moins de produits achetés par course, plusieurs « visites » par mois.

Mais, dans une dynamique inattendue après la pandémie de Covid19 en 2022, des supérettes dérivées des grandes chaînes s’installent insidieusement au rez-de-chaussée des HLM anciens et nouveaux, dans de petits espaces à peine observés auparavant. Ici, on achète une baguette, là – une bouteille d’eau minérale ou un fruit, selon les besoins ponctuels et les prix proposés.

C’est le format magasin de proximité, qui prend la relève, partout, dans le pays, au bénéfice des clients de tout âge ; les gagnants sont surtout les personnes âgées qui peuvent s’acheter un croissant chaud ou une banane selon leur envie du moment. Un exemple : tout droit, à 15 mètres de mon HLM – c’est un Profi ; à gauche, à 80 mètres il y a un Shop and go (proposé par l’enseigne Méga Image) ; tournant à droite de mon HLM, à 250 m, une supérette Carrefour city juste à côté d’un ancien petit magasin alimentaire ; enfin, on traverse au feu vert du premier carrefour et, à 300 m – un Méga Image. Dans la même direction, mais à 800 mètres, un nouveau Lidl né il y a quelques mois. Cette enseigne propose deux fois par semaine – le lundi et le jeudi (choix bien réfléchi) – des réductions importantes de prix, pour des produits de toute la gamme de qualité, pas seulement pour des marchandises à la limite de validité. Le téléphone portable ou le dépliant sur papier aide les clients à fixer leur option d’achat une semaine avant. La stratégie de Lidl a développé auprès des acheteurs potentiels du quartier, un véritable réflexe de « courir » à la chasse des promotions – produits frais du « marché » Lidl et autres.

Un autre exemple des nombreuses stratégies mises sur pieds par chaque chaîne commerciale : Carrefour met à la disposition des clients des quartiers plus éloignés, des microbus à des intervalles horaires très convenables.

Des cartes de fidélité ou des applications sur le portable récompensent l’acheteur fidèle qui peut choisir un produit gratuit de la gamme offerte à cette fin. Le nombre de clients qui payent aux caisses en libre-service est en hausse. La valorisation des produits locaux est un élément fort des magasins. C’est une politique presque généralisée dans les grandes chaînes commerciales. Ainsi, d’une part, on enregistre une véritable chasse de prix bas et, d’autre part, une véritable chasse aux clients – « image » valable pour toutes les enseignes commerciales.

Avec la promotion en ligne des produits frais, la vente directe du producteur – réglementée par la loi depuis plusieurs années – ne cesse de se développer en Roumanie.

Même en l’absence de toute restriction médicale (Covid19 ou épidémie de grippe), les achats surinternet et la livraison à domicile – une habitude déjà acquise – se multiplient du jour au lendemain. Par rapport à 2021, en 2022, le marché de l’e-commerce a augmenté de 25%.

L’enseigne EMag – l’un des leaders du commerce électronique de Roumanie, a développé une plate-forme sur laquelle de nombreuses autres enseignes présentent leur offre. En même temps, pour mieux gérer la gestion du grand nombre de colis qu’il faut envoyer rapidement à l’acheteur, EMag a adopté la solution de distribution « EasyBox » – casier sécurisé, accessible jour et nuit aux acheteurs. Cette démarche concrète, de rapprochement de l’acheteur, a joué un rôle important dans le développement de leur activité : « une augmentation de 15% du taux de conversion des visiteurs du site EMag en 2022 par rapport à l’année précédente » et « une réduction des coûts d’expédition et de logistique de 10% ». En résumé, une rentabilité améliorée de beaucoup. Il faut mentionner en tête de liste, chacun dans sa spécialité : Dedeman (matériel de construction), elefant.ro (librairie), Farmacia Tei (pharmacie), Decathlon (sport), Noriel (jouets).

Dans le commerce de gros, entre janvier et octobre 2022, le chiffre d’affaires (excepté le commerce de véhicules et motos) a augmenté en termes nominaux d’environ 23,6%. L’INS (Institut National de Statistique) a publié quelques données : à la fin du mois de décembre 2022, l’inflation a atteint 16,4% par rapport à l’année précédente; les prix ont augmenté d’un mois (novembre 2022) à l’autre (décembre 2022) de 0,4%; les affaires du commerce ont augmenté les premiers 9 mois de 25% (produits agricoles bruts et animaux vivants, alimentaires, boissons, tabac, machines, équipements et fournitures, biens de consommation autres que denrées, équipements informatiques et de télécommunication).

Les Roumains continuent à changer d’habitudes de consommation à cause de l’inflation et des prix de l’énergie et des combustibles en hausse mais aussi, grâce à une conscience plus ciblée sur leur propre santé. C’est pourquoi, ils abandonnent l’achat de produits non-essentiels pour favoriser l’achat des aliments sains, même s’ils sont plus chers. Les sommes destinées à l’alimentation, à l’éducation et à la formation, aussi bien qu’à l’épargne et investissement, se sont diminués en 2022 par rapport à 2021.

Les Roumains changent rapidement d’habitudes d’achat, préférant les achats personnalisés, les formes de commerce qui épargnent leur énergie et leur temps – les commandes en lignes avec des livraisons rapides (qui ont augmenté 4 à 5 fois en 2022), le payement par carte bancaire aux caisses automatiques. En même temps, ils prêtent plus d’attention à leur avenir financier malgré l’inflation qui a dépassé 16% à la fin de l’année 2022.

(Informations prélevées des articles publiés dans les journaux de spécialité économique, et des données publiées par l’Institut National de Statistique.)

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