Quick commerce : commerce ou entrepôt ?

Il a fallu attendre presque le temps d’une gestation (de septembre 2022 au 24 mars 2023) pour que le décret sur les dark stores, impatiemment attendu par les municipalités des grandes villes, les quick commerçants et nous, pour la rédaction de cet article[1], soit enfin publié évoquant le quick commerce !

Le quick commerce c’est quoi finalement ?

Le gouvernement a tranché. Les dark stores doivent être considérés comme des entrepôts et non comme des commerces. Le conflit qui opposait les quick commerçants aux maires des principales grandes villes va maintenant se calmer.

Les maires ont gagné, les darks stores de centre-ville seront fermés ou repoussés à la périphérie des villes. La promesse d’une livraison en une dizaine de minutes n’aura duré que quelques mois.

Si le décret a tant tardé à être publié, c’est en partie parce que le gouvernement attendait le dénouement du procès qui opposait Gorillas Frichti (actuellement Getir) à la mairie de Paris.

En effet, dès juin 2022, la ville de Paris avait exigé la fermeture des dark stores car ils nuisaient gravement à l’environnement selon elle.

Le 23 mars 2023, le Conseil d’État – la plus haute juridiction administrative du pays – a rendu un jugement en cassation qui confirmait que les dark stores étaient bien des entrepôts.

Cette décision est lourde de conséquences :

  • Les maires reprennent, via le PLU (Plan Local d’Urbanisme) le contrôle du développement commercial de leur ville. Ils pourront exiger la fermeture de locaux commerciaux utilisés comme lieux de préparation de commande et interdire l’implantation de nouveaux dark stores.
  • Les nuisances sonores en centre-ville vont diminuer, car on assiste et on assistera encore à de nombreuses fermetures.
  • Le marché du quick commerce se rétrécit considérablement car si les temps de livraison augmentent les consommateurs ultra pressés vont envisager d’autres solutions.
  • L’inflation des prix dans l’alimentaire est plus favorable aux commerces pratiquant des prix bas qu’au quick commerce qui reste, malgré leur promesse, plus chers que les supermarchés.
  • Devant un marché devenu très difficile, on a connu et connaîtra d’importants licenciements, surtout parmi les livreurs.
  • Comme aux États-Unis, il est prévisible que les quick commerçants chercheront à transformer totalement ou partiellement les lieux de préparation de commandes en supermarchés.
  • Retrait des investisseurs qui préfèreront «se couper la main plutôt que le bras ». Les rachats et les faillites s’expliquent, en grande partie, par le revirement des financiers qui ont cessé d’injecter des capitaux dans des entreprises aux pertes abyssales.

En avril 2023, La société Getir Turquie la maison mère de Getir France qui a déjà investi 150 millions € dans sa filiale française a décidé de ne pas injecter de nouveaux capitaux pour redresser Getir France ?

  • Risques accrus de faillite et de retraits de quick commerçants[2] dont les bilans étaient déjà désastreux et qui sont maintenant privés de capitaux.
  • Les gagnants de ces bouleversements seront les plateformes de livraison (Deliveroo et Uber Eats) car elles ont une activité double : livraisons de repas de restaurants et quick commerce. Elles possèdent aussi un précieux fichier client y compris celui résultant de leurs accords avec les grands distributeurs.

Le quick commerce demain

Le quick commerce est une niche de plus en plus petite, ce que nous affirmions déjà dans notre article de 2022.

En deux ans les préoccupations de la population ont radicalement changé. On est passé de la période du « quoi qu’il en coûte » du COVID et du post COVID, très favorable au quick commerce, à l’inflation et au pouvoir d’achat très défavorable au quick commerce.


Annexe 1
Destin des acteurs du Quick commerce sur le marché français
Les disparus

Les menacés

Les survivants

[1] Voir sur le site de l’Académie des Sciences Commerciales les articles Marc Benoun et Blaise Durand-Réville, Quick commerce, du rêve à la réalité du 25/1/2023 et le Quick commerce : le temps a ses limites du 8/2/2021

[2] Annexe 1 -Destin des acteurs des quick commerce sur le marché français

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