Démarchage à domicile abusif, faux avis sur internet, promotions mensongères, que prévoit la loi pour protéger le consommateur contre ces pratiques commerciales illicites ? Quid de la directive Omnibus, transposée en France en décembre 2021 et entrée en vigueur le 28 mai 2022, pour renforcer les droits du consommateur ?
La loi du 3 décembre 2020 d’adaptation au droit de l’Union européenne (UE) en matière économique et financière, dite loi DDADUE, publiée au Journal officiel de la république française (JORF) du 4 décembre 2020, a notamment pour objectif de renforcer les droits des consommateurs et les pouvoirs de la Direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (DGCCRF). A cette fin, cette loi doit permettre d’une part la transposition dans notre droit de trois directives adoptées en 2019 et d’autre part de mettre en conformité notre droit avec deux règlements récents de l’UE : l’un relatif à la réglementation du blocage géographique injustifié et l’autre concernant la lutte contre les contenus illicites.
La transposition des trois directives vise : 1) les contrats de vente de biens ; 2) les contrats de fourniture de contenus numériques et de services numériques ; 3) la révision et la modernisation d’une partie de l’acquis européen via la directive Omnibus.
Dans le présent article, nous allons nous intéresser à la directive Omnibus qui a été transposée en droit français par l’ordonnance n° 2021-1734, publiée au JORF du 22 décembre 2021 et entrée en vigueur le 28 mai 2022.
Quels sont les enjeux de la directive Omnibus pour les consommateurs et les entreprises ?
La directive Omnibus établit de nouvelles contraintes dans les relations entre professionnels et consommateurs. Par ailleurs, elle enrichit le code de la consommation de trois nouvelles définitions concernant les concepts de place de marché en ligne, d’opérateur de place de marché en ligne et de pratique commerciale.
- Place de marché en ligne : « service utilisant un logiciel, y compris un site internet, une partie de site internet ou une application, exploité par un professionnel ou pour son compte, qui permet aux consommateurs de conclure des contrats à distance avec d’autres professionnels ou consommateurs ».
- Opérateur de place de marché en ligne : « tout professionnel qui fournit une place de marché en ligne aux consommateurs ».
- Pratique commerciale : « toute action, omission, conduite, démarche ou communication commerciale, y compris la publicité et le marketing, de la part d’un professionnel, en relation directe avec la promotion, la vente ou la fourniture d’un bien, d’un service, ou portant sur des droits et obligations ».
Cette directive répond au souhait de la Commission européenne de renforcer la protection du consommateur confronté aux évolutions du commerce électronique.
Les nouveaux droits des consommateurs
L’article 3 de la directive Omnibus rappelle que « l’UE a déjà pris un certain nombre de mesures pour sensibiliser davantage les consommateurs, les professionnels et les spécialistes du droit des consommateurs et pour améliorer l’application des droits des consommateurs et les réparations dont ils peuvent bénéficier. Cela étant, « il subsiste des lacunes dans les droits nationaux concernant des sanctions réellement efficaces et proportionnées pour sanctionner les infractions affectant plusieurs Etats membres et de nombreux consommateurs ».
Face à cet état de fait et pour renforcer la protection des consommateurs, la transposition de la directive durcit les sanctions en matière de démarchage à domicile abusif, de faux avis sur internet et de promotions trompeuses.
Démarchage à domicile abusif
Désormais, le démarchage à domicile est interdit sauf si le démarcheur obtient l’accord préalable du client sollicité.
Faux avis sur internet
Comme le démontre la DGCCRF dans un article intitulé « Avis en ligne : attention aux faux commentaires ! », « les avis ne sont pas toujours fiables ». Cette direction, rattachée au Ministère de l’Economie, écrit : « Qu’il s’agisse de faux avis positifs postés par un professionnel, son entourage ou une agence de communication, ou bien d’avis négatifs rédigés par un concurrent ou toute autre personne malveillante, ces commentaires trompent le consommateur et faussent la concurrence ».
La directive Omnibus considère comme une « pratique commerciale déloyale le fait de tromper les consommateurs en indiquant que les avis ont été soumis par des consommateurs ayant effectivement utilisé le produit, alors qu’aucune mesure raisonnable et proportionnée ne permet de le démontrer ». Elle impose ainsi aux commerçants de vérifier et garantir la fiabilité des avis postés.
Fausses promotions interdites
Pour lutter contre les fausses promotions, la directive prévoit que le vendeur doit afficher le « prix antérieur » correspondant « au prix le plus bas pratiqué par le professionnel à l’égard de tous les consommateurs au cours des trente derniers jours précédant l’application de la réduction de prix ». En outre, si le commerçant pratique des « prix personnalisés », il est tenu d’en informer les consommateurs.
Les conséquences pour les entreprises : durcissement des sanctions
Transposée en droit français, la directive Omnibus durcit la législation sur les « pratiques déloyales et trompeuses ainsi que les clauses abusives ». Elle « impose aux Etats membres de prendre des mesures d’exécution, y compris d’infliger des sanctions, de manière effective, efficace et coordonnée, en vue de faire cesser ou d’interdire des infractions de grande ampleur ou des infractions de grande ampleur à l’échelle de l’Union[1] ».
Les sanctions financières sont notamment renforcées. Si les commerçants ne se soumettent pas aux nouvelles obligations légales édictées par la directive, l’amende sera de 15 000 euros pour une personne physique et de 75 000 euros pour une personne morale contre 3 000 euros et 15 000 euros précédemment. Enfin, en cas d’infraction dite de « grande ampleur ou de grande ampleur à l’échelle de l’Union européenne », le montant de l’amende pourra être porté à 4 % du chiffre d’affaires moyen annuel de la société visée, calculé sur les trois derniers chiffres d’affaires annuels connus à la date des faits.
La directive Omnibus renforce la protection des consommateurs à la lumière de l’évolution des outils numériques. Mais face aux nouvelles exigences imposées par cette directive, certaines entreprises comme celles dont le canal de distribution privilégié est la vente à domicile expriment leur inquiétude. Comment trouver un juste équilibre entre un niveau élevé de protection des consommateurs et la compétitivité des entreprises ?
[1] L’ordonnance du 22 décembre 2021, qui transpose la directive Omnibus dans le droit français, distingue deux infractions, l’une dite de « grande ampleur », l’autre de « grande ampleur à l’échelle de l’Union » (art . L.241-1-1 du Code de la consommation).